Tragiques nouvelles du front
Le 6 juin 1944, les Alliés débarquent en Normandie.
Le 25 août, Paris est libéré.
Le 1er septembre, la 3ème Armée de Patton arrive devant Metz, qui est libérée le 22 novembre.
Le 7 décembre, c'est au tour de Sarreguemines, 80 kilomètres à l'Est de Metz.
Le 8 décembre, les premiers obus américains tombent sur Erching, un petit village à une vingtaine de kilomètres à l'Est de Sarreguemines, devant la frontière allemande de 1939.
Le 14 décembre, les troupes américaines entrent dans le village. Anne, 17 ans, note sur un cahier d'écolier, l'heure de la libération : il est 14h20.
Un village lorrain en avril 1945 (Rimling)
Deux jours plus tard, Hitler déclenche l'opération "Wacht am Rhein" plus connue sous le nom de Bataille des Ardennes. Devant l'urgence de la situation, l'Armée Patton stoppe ses opérations en Lorraine et vole au secours des unités US engagées dans les Ardennes, tandis que la 7e Armée du Général Patch la relève en Lorraine.
Les troupes américaines abandonnent Erching et s'installent en position défensive sur la crête qui surplombe le village. Celui-ci, ainsi que son annexe Guiderkirch, est immédiatement réinvesti par les Allemands.
A partir du 17 décembre, Erching et Guiderkirch sont constamment bombardés par l'artillerie, et sont souvent le théâtre de combats entre patrouilles d'infanterie allemandes et US. Les habitants se terrent dans les caves, nuit et jour.
A partir de Noël, ce sont des déluges d'obus qui s'abattent quotidiennement sur Erching, Le village pleure ses premières victimes parmi les civils. C'est alors que la famille d'Anne décide de fuir le village dès la première accalmie, pour rejoindre les lignes américaines et l'arrière du front.
Le 27 décembre, les fugitifs parviennent à gagner sains et sauf les premières lignes américaines, d'où on les emmène à Rimling, et de là, à Montbronn, un village de l'arrière.
C'est là qu'ils restent réfugiés jusqu'à ce jour de mars 1945, où leur parvient une lettre qui leur apprend une terrible nouvelle…
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?. ?. ? ? Achen 17 III 45 Mein l. Jean ! Heute brachten mir die Gendarmen deinen Brief. Bin froh, etwas von dir zu hören. Du hast Recht gehabt , dich rechtzeitig aus dem Staub zu machen denn uns, die wir zurückblieben, ist est nicht gut gegangen. Seit dem 9/XII. 1944 fast immer im Keller. Gegen Ende war es fast gar nicht mehr zum Aushalten. Man konnte kaum mehr aus dem Keller. Die Leute hatten manchmal nicht den Mut, ihr Vieh zu füttern, soweit es nicht durch Bomben oder Diebstahl geraubt war. Das meiste Vieh ist kaput oder gestohlen durch | ?. ?. ? Aujourd'hui les gendarmes m'ont apporté ta lettre. Je suis heureux d'avoir de tes nouvelles. Tu as eu raison2 de t'éclipser en temps utile, car pour nous qui sommes restés, ça ne s'est pas bien passé. Nous sommes restés dans la cave presque sans interruption depuis le 9 décembre 1944. Vers la fin c'était presque insupportable. C'était à peine si on pouvait sortir de la cave. Parfois, les gens n'avaient pas le courage de nourrir leurs bêtes, lorsqu'elles n'étaient pas tuées par les bombes ou volées. La plupart des bêtes ont été tuées ou volées par |
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Keller "Bibel" kamen um, Bibel Nic., Maria u. Antonia, Bertrand u. Ernest (Neffen), Brihl Jac. u. Frau (Polizei3), Schneider Etienne Gross Juliette. Neben dir bei Val. Behr ist Yvonne totgeschlagen. In "Alt-Mames" kamen um, Barthel Stanislaus u. alle 5 Kinder (Frau hat man am 24/II lebend ausgegraben). - Weber Victor mit 4 Kindern (Frau u. 3 Kinder lebend ausgegraben). Die 3 Kinder vom Klingler Jos. u. ihre Tanten Pauline u. Anna Klingler Jos. u. Frau wurden auch ausgegraben, lebend. –Bei Kremer Theod. kamen um Wack Moritz (Vater), seine Söhne Moritz u. Paul mit Frauen u. Kindern, Grossmutter Hular mit Denyse (Frau u. Ferd. u. René sind schon früher umgekommen), ferner Frau Wagner Pierre (Pauline) mit allen Kindern ; Kremer Nic. mit allen 4 Mädchen. Auf einem Bericht stand noch Klingler Ignaz II. Wie du siehst hat deine Tante Nachfolger bekommen. Es ist ein schreckliches Unglück | |
Bei uns in Güderkirch sind umgekommen durch Granat-Einschlag : Alex Schneider (bei Aloys Kremer) (26/I) Dorkel Michael (5/II) Wagner Leonie (9 Jahre alt) bei mir im Pfarrhaus am 20/II. u. –armer Paul- am 21/II Wilpert Elis, die Frau von Brihl Paul. Am 27/II kam um bei unserer Flucht aus dem brennenden Pfarhaus die Frau Burgun (hinter mir erschossen.) Ihr Mann u. Anna Beck die in meinem Keller waren, wurden angeschossen u. sind irgend wo im Lazareth. Bei mir hier sind Hinschberger, meine Köchin, Anna Behr, Luise u. Mutter Barthel (Leonard), Marie-Therese (bei burgun). – Wagner Alfons mit seinen Kindern, die Frau von Hinschberger u. Maria Beck, die mit uns unter schrecklichem Feuer der Artillerie u. Gewehrfeuer aus dem brennenden Pfarrhaus flüchteten, haben wir in der Aufregung aus der Augen verloren. –Dem Paul seine Clara ist | |
mit der Frau von Frischmann Jos. am 21/II bei einem Einschlag in den Keller, wo Elise getötet wurde, verwundet u. ins spital ins Reich gebracht. Dort ist auch Huver Jos. (Meyer) –Splitter in seite, Bein, Barbare Lutz (Mutter Weber), Frau Wack Moritz (Vater) Gross Aloys, Lutz Athanasius, die verwundet wurden bei den Aufraümungsarbeiten am 24/II in Erchingen. Die Notwohnung4 von Behr Aug. ist vollständig zerstört. Er war im Keller von Schneider Andreas. Wack Moritz, dessen Haus u. Stallungen auch arg mitgenommen waren, waren erst vor einigen Tagen zu Kremer gezogen. Am 21/I ist auch Klingler Ignaz gestrorben, der alte Meyer, im Keller von Andreas Schneider. Am nämlichen Morgen hatte ich ihm die Sterbesakramente gestpendet u. seit damals war ich nicht mehr in Erchingen. Es war zu gefährlich. Am Stephan Tag5 lies ich zum letzten mal die Hl. Messe in der Kirche,
| et la femme de Frischmann Jos. ont été blessées le 21 février par un impact d'obus dans la cave où Elise a été tuée, et transportées à l'hôpital dans le Reich. Là se trouvent aussi Huver Jos. (le maire) -des éclats dans les côtes et dans la jambe, Barbara Lutz (la mère Weber), Madame Wack Moritz (le père), Gross Aloys, Lutz Athanasius, qui ont été blessés lors de travaux de déblaiement le 24 février à Erching. La baraque4 de Behr Aug. est entièrement détruite. Il se trouvait dans la cave de Schneider Andreas. Wack Moritz, dont la maison et les étables étaient sévèrement endommagées, s'étaient établis depuis quelques jours seulement chez les Kremer. Le 21 janvier Klingler Ignaz, le vieux maire, est décédé dans la cave d'Andreas Schneider. Le matin même je lui avais dispensé le sacrement des mourants ; depuis ce jour je ne suis pas retourné à Erching. C'était trop dangereux. J'ai lu la Sainte Messe pour la dernière fois à l'église le jour de la saint Etienne5 |
dann, wenn es ging, wenn nicht aller Raum von Soldaten besitzt war, im Keller des Pfarrhauses. Gegen Ende kam niemand mehr aus dem Dorf, es war zu gefährlich, nur die 25, die im Pfarrhaus Keller waren, wohnten bei Hänsels u. Dumser's wurden durch Granateinschlag in ihrem Keller verschüttet u. kamen dann auch zu mir, bis auch wir am 20/II einen Volltreffer bekamen, der in den Keller einschlug u. die kleine Leonie tötete. Uber uns, in der Küche wurden 4 Funker zerrissen. Darauf hin zogen Dumser's u. Hänsels wieder aus u. gingen zum Organisten. Dort sind auch Krebse (Edmund, Firmin sind an 21/XII zurück mit den Amerikaner) Jolly, Maurer, Jacob, Huths, Anna Lutz mit kind. –Die Kirche ist arg mitgebommen. Fachstube fast ganz
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détruite, sur le côté des femmes un grand entoinnoir, les bancs, le confessionnal, la chaire sont en ruines. –Cette semaine j'ai appris que Lutz Josef (le mari de Félicie), Martin Barthel et Peter Schneider sont à Höllingen. Jos. Huver (le fils de Nic.) est à Rahling. Je ne sais pas où sont les autres. Quelques jours avant le malheur survenu à Erching, a été détruite la statue de la Sainte Vierge sur le Kohlenberg. Notre chère paroisse a été terriblement frappée. Pourvu qu'il n'y ait pas eu d'autres victimes depuis les 14 jours où je suis parti. Bien-sûr, ici nous avons informé qui il se doit. Chez les Américains on croyait qu'il n'y avait plus de civils là-bas ! ici. Des prisonniers auraient rapporté que les allemands les avaient évacués. C'est la raison pour laquelle arriva aussi l'attaque aérienne du 23 février sur Erching, où il y avait le poste de commandement du bataillon, |
| d'où le bombardement continuel. Tu comprendras combien cette affaire m'a éprouvé. 3 mois dans la cave sans pouvoir quitter mes vêtements, assis sur la chaise, dans un mauvais éclairage, au milieu de 16 personnes ; à la fin, tout contact avec la paroisse était impossible. C'était à peine si nous pouvions sortir devant la porte., presque chaque jour des obus tombaient sur la maison, où nous tremblions et priions. Que ces pauvres gens me font de la peine, d'être si seuls maintenant. Je lis chaque jour la Sainte Messe pour eux, ce que je ne pouvais plus faire là-bas, puisque l'église et le presbytère sont détruits et qu'il n'est possible de le faire dans aucune cave là-bas. Chez Fischer, dans la cave –pleine de monde ! se trouvent Wack Josef, Huver Paul. Exprime mes sincères condoléances au Paul. Je m'étais rendu chez sa femme dans la cave encore quelques jours plus tôt, pour lui porter une lettre d'Obergailbach. Là tout allait bien, encore. Dieu donne la paix éternelle à tous ceux qui sont morts et console les survivants! Oskar va-t-il au catéchisme6? |
1 - quatre lettres dont le sens est à préciser ; de toute évidence un monogramme à sens religieux
2 - les passages soulignés l'ont été par l'auteur de la lettre
3 - Polizei = garde-champêtre
4 - Notwohnung = baraque pour l'hébergement de sinistrés ?
5 - Stephanus Tag : jour de Saint Etienne ; le 26 décembre
6 - Unterricht = leçon, cours d'instruction, que nous traduisons par "Catéchisme"
7 - au curé de Montbronn
L'auteur de la lettre